« La guerre selon Charlie Wilson », Mike Nichols
USA - 2008, 105'
Incroyable mais vrai ! Comment un vulgaire petit député du Texas nommé Charlie Wilson, grand amateur de scotch, plutôt abonné aux parties de jambes en l’air qu’aux honneurs militaires a-t-il pu être l’instigateur de la première guerre Afghane ?
Adapté du roman de George Crile, paru en 2003, « La guerre selon Charlie Wilson », dernier film de Mike Nichols, est une comédie politique aux dialogues enlevés ; aidé par la plume d’Aaron Sorkin, scénariste surdoué de la série « A la maison Blanche », le réalisateur du « Lauréat » s’est livré ici à un véritable tour de passe-passe qui résonne fortement à l’heure où la politique internationale américaine se trouve contestée comme jamais auparavant.
La recette ? Jouer à fond la carte parodique en présentant des personnages clownesques, aux mœurs et aux valeurs caricaturés à l’extrême ; en premier lieu, bien-sûr, le légendaire Charlie Wilson (Tom Hanks), politicien libertin, dont la désinvolture n’a d’égal que son goût pour les femmes plantureuses ; la milliardaire texane Joanne Herring (Julie Roberts), intrigante hors pair dont le but n’est rien de moins que la chute de l’empire soviétique ; et Gust Avrakotos (Philip Seymour Hoffman), agent de la CIA d’origine modeste, frustré par sa hiérarchie et qui rêve de tuer autant de russes que possible. Un vrai trio de choc dont l’improbable rencontre va pourtant bouleverser la face du monde. Leur point commun ? une haine féroce du communisme et la compréhension précoce que la fin de la guerre froide se joue dans les montagne rocheuses d’Afghanistan, envahies par l’Armée Rouge.
La mise en scène énergique de Mike Nichols en souligne toute l'incongruité et c’est un plaisir des yeux que cette valse ininterrompue de cocktails, de réunions politiciennes et de fausses images de guerre. La scène de rencontre entre Charlie Wilson et Gust Avrakotos est un monument du genre avec ses portes qui claquent et ses intriques secrètes. Son génie chorégraphique rappelle l’âge d’or de la comédie hollywoodienne et un certain Billy Wilder.
Sous couvert de légèreté, « La guerre selon Charlie Wilson » met le doigt sur l'hypocrysie des relations internationales sous la guerre froide ; pour préserver le secret de l’intervention américaine, la recherche de fonds pour armer les Moudjahidin met en œuvre une alliance invraisemblable entre Israël, l’Egypte, le Pakistan et l’Arabie saoudite. A l’aune de la situation géo-politique contemporaine, on peine à y croire tant une telle collaboration relève du rêve le plus fou. C’est pourtant ça la réussite de « La guerre selon Charlie Wilson », de nous proposer un fait avéré, sans que jamais on ne puisse y croire totalement. Tom Hanks –également co-producteur du film- obtient le rôle de sa vie et révèle un potentiel comique inédit. Philip Seymour Hoffman est irrésistible en figure d’agent de la CIA rustre et canaille ; Julia Roberts est une Julia Roberts blonde, ni plus ni moins. Si elle n’est pas transcendante dans ce rôle de mondaine, elle reste crédible malgré tout.
Certes « La guerre selon Charlie Wilson » n’est pas sans défaut ; à force de présenter l’histoire comme un jeu d’adultes irresponsables, on finit par se déconnecter de la réalité de l’enjeu. Ce qui ce joue dans les 5 dernières minutes aurait gagner à être davantage mis en valeur. Le refus du congrès de débloquer le million de dollars pour construire les écoles et finir correctement le « travail » est incompréhensible. Il signe l’arrêt de mort de milliers de New-Yorkais en ce sombre 11 septembre 2001.
Mais comme on dit à Hollywood, "show must go on!"